Dans moins d’un mois, mon tout petit d’Homme fêtera ses deux ans. Deux ans sur terre, deux ans dans nos bras.
C’est si difficile d’appréhender le temps qui passe. Le temps court, fuit, s’enfuit, se cache, et il ne nous reste que ces souvenirs arrachés à sa course, ces quelques instants fugaces auxquels on s’accroche de toutes nos forces.
J’écris moins, à cause de la fatigue, probablement, mais il ne s’écoule quasiment pas une journée sans que je ne photographie mon fils. « Arrête, tu vas l’user », me dit-on régulièrement. Balivernes… Quand je retombe sur une vieille photo, quand je me replonge dans ces souvenirs qui ne sont mêmes pas si vieux, je me retrouve à l’exacte place où j’étais lorsque la photo a été prise. Je retrouve mon état d’esprit du jour, mes pensées, les odeurs, les bruits… Chaque série de photos est comme une capsule temporelle qui me permet de revivre la petite enfance de Nino.
Au delà de ses progrès d’enfant, impressionnants et fulgurants, évidemment, c’est mon évolution en tant que mère que je me surprends à contempler. Mes doutes, mes batailles, mes peurs, mes victoires, mon quotidien. C’est si facile d’être happé par la vie, et de ne plus prendre le temps de s’arrêter pour voir le chemin parcouru, que j’ai besoin de ces « rappels ». Ces souvenirs bruts, en vrac et mal cadrés sont mon journal intime de femme et de mère. Ils représentent mes étapes de vie, la façon dont je grandis.
Avec le temps, j’ai compris que tout était une question d’équilibre. Il n’y a pas de situation stable, fixe, ou définitive. Nous sommes soumis à tellement de pressions extérieures, aux aléas de la vie, de la mort parfois, nous réagissons à notre environnement, nous ajustons nos actions, nos décisions, nous réagissons en fonction de ce qu’il se passe autour… Et tout bascule en un battement de cil. Alors, à nouveau, on s’adapte, on modifie nos gestes, on ajuste, on tâtonne, on cherche… jusqu’au prochain chamboulement. La vie est une successions de changements, amenés par nous-mêmes ou par les autres, par les circonstances de la vie ou par une volonté particulière. Et nous sommes les funambules, ces artistes qui dansent dans les airs, sur une corde raide, en essayant de garder le cap, de ne pas lâcher prise. De conserver le regard, les épaules, la poitrine, dans la bonne direction, pour continuer d’avancer.
Le mois prochain, je fêterai mes deux ans de maman. Les deux années les plus intenses de toute ma vie, les plus belles aussi, et les plus difficiles. Cette étape me pousse à faire un bilan personnel de ces deux dernières années. M’aide à analyser, le plus rationnellement possible, tout le chemin parcouru.
Depuis mon accouchement, je raconte à qui veut bien m’écouter que pour moi, une femme qui donne la vie est une super-héroïne. Une rock star, une championne. C’est ce que je me répète chaque fois que tout devient un peu trop difficile. Et j’y crois sincèrement. Je suis intimement persuadée qu’il n’y a pas de petite victoire, et qu’il faut savoir savourer chaque journée qui finit avec un enfant en vie, en bonne santé, et des parents ensemble et amoureux. C’est tout ce qui compte à mes yeux. C’est le plus important.
Et tout ceci me montre à quel point j’ai changé, à quel point j’ai muri. A quel point, sans m’en rendre compte, j’ai également mis à jour mes priorités. Le regard des autres, les jugements hâtifs ou systématiques, les avis des personnes qui n’ont pas les mêmes objectifs que moi, me touchent de moins en moins. Ils m’effleurent, puis je m’efforce de les laisser de côté pour avancer sur mon chemin. Après tout, les « tu devrais » et les « il faudrait » n’ont jamais aidé personne à vivre un quotidien serein. Au diable toute cette culpabilité, au diable la pression d’être la femme, la mère, et la business-woman parfaites. Petit à petit, un pas après l’autre, j’apprends à me remercier pour ce que je fais. A me donner des objectifs réalisables. A ne pas me juger trop durement lorsque la vie me joue un tour qui me met en difficulté…
Bref, je suis maman depuis presque deux ans. Et j’ai enfin accepté d’être moi, juste moi.