Depuis quelques jours, mon fils, mon tout petit, la chair de ma chair, mon minuscule bébé a décidé que le sein, ça ne l’intéressait plus tant que ça. Depuis quelques jours, il se colle contre moi, joue avec le sein que je lui propose au lieu de manger alors que je sens bien qu’il a faim, me lance de grands sourires, et me montre bien qu’il attend autre chose. Depuis quelques jours, j’ai ce pincement au cœur, et je me retrouve à être jalouse du biberon !
Ce n’est pas tant le biberon qui m’agace. Ce serait même plutôt un soulagement, à vrai dire, puisque ça signifie que désormais, Nino peut être nourri de façon totalement autonome par quelqu’un d’autre que moi. Ça signifie que potentiellement, je peux m’absenter un jour ou deux sans qu’il ne meure de faim. (Oui, je dramatise !)
Non, ce qui me serre un peu le cœur, c’est que je réalise la vitesse à laquelle tout ceci va. La maternité, l’apprentissage, la vie en général. Je comprends enfin que chaque instant est fugace et que ces rituels, que nous avons mis si longtemps à mettre en place, ne sont jamais que des instants provisoires, des petits moments si rapidement relégués au rang de souvenirs. Je ne visualise déjà plus que dans un lointain souvenir ce que ça fait de l’allaiter à plein temps. Ce que c’était que d’être sa seule source de nourriture. La personne la plus importante de sa si courte vie. Aujourd’hui, son papa et moi sommes à rang égal, déjà. C’est à la fois un grand bonheur, et une petite souffrance.
Aujourd’hui, mon petit d’homme se détache un peu de moi. Il le fait de lui même, c’est une de ses premières « grandes » décisions. Avec ses sourires et sa petite moue bien à lui, il me fait comprendre que ce n’est plus mon petit nourrisson. Que ça y est, il est désormais bébé, il choisit quand et comment il se nourrit. D’ailleurs, il lorgne de plus en plus ce que nous portons à la bouche, nous ses parents, et nous distinguons également une envie de plus en plus pressante de goûter à la « vraie » nourriture. Patience mon bébé, ça va venir si vite …
Enceinte de Nino, je m’étais fait, comme de nombreuses femmes avant moi, un « plan » idéal sur la façon dont j’allais gérer ma maternité, sur ce que je voulais pour mon bébé, sur mes objectifs de « bonne maman ». Il était évident que le plan allait subir nombre de modifications, mais j’avais une trame essentielle dont j’étais sûre de ne pas dévier. Évidemment, j’ai dévié. Évidemment, je dévie. Et évidemment, IL dévie… c’est sans doute la partie à laquelle je m’attendais le plus et paradoxalement, celle qui m’étonne le plus.
Mon fils, cette petite personne au caractère déjà si présent, prend désormais ses propres décisions. Mon fils arrête l’allaitement, et c’est à moi de m’y faire. C’est à moi, la jeune mère qui aurait tant aimé l’allaiter de façon exclusive jusqu’à ses six mois, de m’adapter à ses désirs, à ses besoins. Quelle leçon de vie pour moi !
Je prends enfin la mesure de ce qu’un enfant nous apporte. Un bouleversement de vie, certes, mais également un apprentissage constant. Avec Nino, j’apprends à être meilleure, plus douce, plus patiente, mais également à respecter pleinement sa volonté propre. J’apprends à composer avec son caractère et le mien, j’apprends à le connaître. Je m’efforce de lui laisser la place de s’exprimer en tant que personne à part entière, et peu importe ce petit pincement au cœur que je ressens. J’apprends à être maman, et ce début de détachement est ma toute première leçon…